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Lucie Postel

Plante et rocher
  • 2024
  • Peinture sur bois à l’huile et au brou de noix
  • Dimensions 7,5 x 6,5 x 1 cm
  • Signature au dos
  • Œuvre unique
76€

LUCIE POSTEL

Il était une fois dans un bois un portrait funéraire égyptien, un Fayoum. La vie de peintre de Lucie Postel commence comme un conte : le bois est la matière révélée d’un exercice pictural lors d’expérimentations aux ateliers d’arts plastiques d’Évry-Courcouronnes, poursuivies aux Beaux-Arts et à l’école nationale supérieure d'art - Villa Arson par la technique du brou de noix ; le portrait funéraire figure l’obsession pour l’invention poétique d’un lieu mental. En ses peintures, des ruines de maison mangées par le rêve s’ouvrent sur une femme-oiseau et un corps-arbre. C’est une histoire naturelle, de liberté persistante des ombres, de nuits inaccessibles et inquiétantes, de corps en métamorphoses, une histoire écrite dans la grammaire visuelle d’une œuvre "où le réel et l’imaginaire peuvent coexister sans hiérarchie".

Plusieurs éléments m’ont amenée à travailler sur de petits formats. Tout d’abord, lorsque je découpe mes panneaux de bois, il me reste souvent de petites chutes que j’ai eu envie d’utiliser. Ensuite, dans le cadre de mon travail vidéo, j’ai pensé qu’il serait intéressant de créer des "zooms" sur certains éléments de mes peintures, comme pour mettre certains détails en avant, ou ponctuer mes installations de petites "virgules picturales".

ENTRETIEN

L’ARBRE DE L’ART 

Je devais être en primaire lorsque ma mère m’a inscrite aux ateliers d’arts plastiques d’Évry-Courcouronnes. Là-bas, j’ai eu la chance d’expérimenter différentes techniques, et c’est sans doute ce qui m’a permis de réaliser plus tard que je me sentais particulièrement…

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ENTRETIEN

L’ARBRE DE L’ART 

Je devais être en primaire lorsque ma mère m’a inscrite aux ateliers d’arts plastiques d’Évry-Courcouronnes. Là-bas, j’ai eu la chance d’expérimenter différentes techniques, et c’est sans doute ce qui m’a permis de réaliser plus tard que je me sentais particulièrement proche de la peinture.

J’ai suivi presque tous les cours possibles : ceux pour les enfants, puis pour les ados, la classe préparatoire, jusqu’aux ateliers pour adultes.

Je me souviens en particulier d’un atelier où j’ai découvert les portraits du Fayoum. Ces portraits funéraires égyptiens. J’ai été vraiment fascinée par eux. On nous avait appris à les reproduire en peignant sur des panneaux de bois, comme à l’époque. Cette expérience a été un véritable tournant : je me suis rendu compte que cette technique me plaisait profondément. Depuis, elle a influencé tout mon travail en peinture, au point que je peins aujourd’hui uniquement sur bois, sauf à de très rares exceptions.

 L’ABSOLU DE LA PEINTURE

Je crois que, dans mon cas, les études d’art m’ont surtout permis de comprendre avec certitude que la peinture était essentielle pour moi. Aux Beaux-Arts, on nous pousse à expérimenter différents médiums, à sortir de nos habitudes. J’ai donc essayé de m’éloigner un peu de la peinture, de voir si autre chose pouvait me convenir. Mais assez vite, j’ai senti que ça ne fonctionnait pas.

À la Villa Arson, il me semblait que la peinture n’était pas vraiment valorisée, encore moins lorsqu’elle était pratiquée par une femme, et qui plus est lorsqu’elle était "sensible". Quand j’ai redoublé ma troisième année, j’ai pris une décision nette : si je devais réussir mes études, ce serait grâce à la peinture — ou alors pas du tout.

En parallèle, les Beaux-Arts m’ont offert l’opportunité de tester énormément de médiums : il y avait des ateliers bois, gravure, sculpture, couture… Cette diversité m’a permis d’expérimenter et de développer des pratiques qui gravitent aujourd’hui autour de mon travail de peintre.

À la Villa Arson, il y a aussi une vraie volonté de nous pousser à travailler l’installation, et c’est quelque chose qu’on est amené à explorer en profondeur tout au long de nos études. C’est donc aussi un langage que j’ai appris là-bas, et qui continue d’accompagner ma peinture.

En ce sens, mes années aux Beaux-Arts m’ont permis à la fois d’affirmer mon choix pour la peinture et d’ouvrir mon champ de pratiques. Mais c’est vraiment après mon diplôme que j’ai pu consacrer le temps nécessaire à développer ma technique au brou de noix, à explorer mon imaginaire et à construire un véritable narratif. Aux Beaux-Arts, les échéances, les rendus et la pression du diplôme laissent peu de place à ce temps long, qui est pourtant indispensable à la peinture.

 LA SUBSTANCE DE L’OBSESSION

Je dois dire que je fonctionne beaucoup par obsessions : je traverse des périodes où je me plonge intensément dans un mouvement ou un artiste, et cela nourrit profondément mon travail. Petite, j’étais fascinée par Chagall. Aux ateliers d’art plastique d’Évry, j’ai découvert les portraits du Fayoum. Plus tard au lycée Courbet, je me suis passionnée pour le mouvement romantique, mais aussi pour l’art religieux, les retables, la Renaissance. Puis je me suis focalisée sur les préraphaélites, avant de dévorer toutes sortes de peintures. Aujourd’hui, je suis dans une phase où les surréalistes m’attirent énormément, notamment le travail de Leonora Carrington ou encore celui de Remedios Varo. Mais en réalité, j’aime la peinture dans toute sa diversité et je garde le désir constant d’en découvrir davantage.

La littérature, elle, est venue plus tardivement. C’est devenu une nécessité au moment où j’ai souhaité introduire plus de narration dans ma peinture, mais aussi entre mes peintures, comme une continuité. J’aime lire des textes liés à la mythologie, avec des autrices comme Madeline Miller. Le premier livre qui m’a vraiment marquée est Les Vagues de Virginia Woolf. J’admire aussi beaucoup l’univers de Susanna Clarke. Plus récemment, je lis Katherine Arden, dont l’univers de contes m’inspire énormément.

CE QUI S’ANIME

Les Beaux-Arts ont été pour moi un moment d’expérimentation de différentes techniques. J’ai vite remarqué qu’il y a, dans une école d’art, des mouvements ou des approches plus valorisés que d’autres. À la Villa Arson, par exemple, l’installation et la manière de présenter son travail dans l’espace occupent une place très importante. On nous incite à réfléchir à la mise en espace, presque autant qu’à l’œuvre elle-même. Cela m’a poussée à chercher des moyens de montrer la peinture autrement que simplement accrochée au mur.

En parallèle, j’avais aussi cette volonté d’introduire de la narration dans mon travail. Pour cela, j’ai commencé à élargir ma pratique et à développer d’autres médiums qui viennent compléter mes peintures. La linogravure, par exemple, est devenue une manière de créer des motifs qui servent souvent à produire des sols, des murs, des papiers peints : en somme, des décors. J’aime l’idée que ce médium, très différent de la peinture, puisse contraster avec mes panneaux de bois. Dans mes installations, je réfléchis un peu comme en peinture : je compose des fonds, des superpositions, des jeux de perspectives, parfois en créant des successions de panneaux ou des ouvertures qui laissent entrevoir un arrière-plan.

La vidéo d’animation est arrivée dans ce même esprit de narration. Je voulais passer de l’image fixe de la peinture à l’image en mouvement, sans doute par ce désir un peu enfantin de donner vie à l’inanimé, de façon presque magique. Pour animer mes peintures, je les découpe d’abord sur Photoshop, puis je les mets en mouvement dans After Effects. Là encore, ma réflexion reste celle d’une peintre : avec l’outil caméra, je compose des plans superposés, je crée de la profondeur, des perspectives. C’est pour moi un moment très ludique, une zone d’expérimentation qui me nourrit énormément. Souvent, mes explorations en vidéo m’inspirent de nouvelles pistes pour mes peintures et inversement. Il y a un vrai dialogue entre les deux.

BRUIT DE BOIS, BROU DE NOIX

C’est lors d’un cours aux ateliers d’arts plastiques d’Évry que j’ai découvert la peinture sur bois, en reproduisant des portraits du Fayoum. J’ai immédiatement adoré travailler sur ce support. Le bois a une texture particulière qui donne à la peinture un rendu que j’aime profondément, mais c’est aussi une question de sensations : quand je peins, je préfère le contact du bois.

Je travaille exclusivement à l’huile de lin, sans utiliser de térébenthine. J’ai développé ma technique de peinture au brou de noix au cours de mes dernières années d’études, un peu par hasard. Je me suis d’abord rendu compte que le brou de noix, soluble dans l’eau, s’effaçait facilement, mais qu’il laissait sur le bois des traces plus claires. Après de nombreuses expérimentations, j’ai trouvé une méthode qui me convenait : je recouvre systématiquement le panneau de plusieurs couches de brou de noix afin d’obtenir une surface bien sombre. Ensuite, j’efface certaines zones avec de l’eau pour créer des nuances.

Une fois le travail au brou de noix terminé, je passe à la couleur, c’est-à-dire à l’huile. L’huile est indispensable, car elle ne se mélange pas avec le brou de noix soluble à l’eau, ce qui évite que les pigments de brou de noix ne viennent altérer la couleur. J’adore aussi le contraste qui se crée entre les deux : sombre et lumineux, mat et brillant. Pour moi, c’est autant une question de technique que de sensations et de jeu avec la lumière et la matière.

INVENTION D'UNE GRAMMAIRE VISUELLE

Après les Beaux-Arts, j’ai commencé à rédiger un texte qui est, en quelque sorte, une mutation en soi. Il a commencé comme une accumulation de petits bouts de phrases et de notes griffonnées dans mes carnets, mêlant fragments d’événements réels et basculements vers l’imaginaire.

Ce texte n’est pas un projet d’écriture : il est un outil de pensée qui me permet de voyager dans mon imaginaire et dans le monde fictif que j’ai construit. Certaines peintures viennent naturellement s’y ajouter ; je les réalise, et elles trouvent leur place dans le texte. Parfois, c’est l’inverse : je développe une idée à l’écrit, et elle prend forme en peinture. C’est un dialogue constant entre l’écrit et le pictural, un espace où réel et imaginaire se rencontrent, se superposent et se transforment. Il y a aussi des éléments de texte indépendants des peintures et vice versa.

Je pense effectivement que mes peintures inventent une sorte de grammaire visuelle, où les éléments se répètent, se déplacent, se métamorphosent d’une image à l’autre, comme des réminiscences ou des souvenirs persistants. Ce va-et-vient entre le conscient et l’inconscient, entre le monde vu et le monde inventé, est au cœur de mon processus.

Le conte est une source essentielle pour mon travail, à la fois parce qu’il me permet de construire une narration et parce qu’il ouvre un espace où le réel et l’imaginaire peuvent coexister sans hiérarchie. Le surréalisme aussi, dans la mesure où mes compositions fonctionnent par associations d’idées, par rapprochements inattendus, et qu’elles convoquent à la fois le rêve et le souvenir.

SECRETS VERTICAUX

Plusieurs éléments m’ont amenée à travailler sur de petits formats. Tout d’abord, lorsque je découpe mes panneaux de bois, il me reste souvent de petites chutes que j’ai eu envie d’utiliser. Ensuite, dans le cadre de mon travail vidéo, j’ai pensé qu’il serait intéressant de créer des « zooms » sur certains éléments de mes peintures, comme pour mettre certains détails en avant, ou ponctuer mes installations de petites "virgules picturales".

J’aime également le fait que ces œuvres tiennent debout et qu’elles nécessitent une attention particulière pour être observées. Elles obligent parfois à se pencher, à se rapprocher ; j’aime l’idée que ce soit presque un secret, qu’on puisse passer à côté sans les remarquer. Ce sont des fragments, que seuls les plus attentifs remarquent.

Il y a aussi une dimension d’accessibilité dans ce choix. Je souhaite que mon travail reste abordable, autant dans sa lecture que dans son acquisition. Je pense aux spectateurs qui ne viennent pas du milieu de l’art, ou encore aux enfants : il me semble essentiel que chacun puisse se sentir invité à entrer dans l’univers de mes peintures et installations, sans se sentir perdu. Proposer de petits formats à prix réduit est donc aussi une façon de permettre à ceux qui n’ont pas les moyens de se procurer une œuvre, d’accéder à mon travail et à mon univers.

 

Sans titre, Lucie Postel, 2025 68€

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